Vous savez, le télétravail, c’est comme le téléphone portable, ça a ses avantages et ses inconvénients. Le vini en poche et tu peux être dérangé(e) à tout moment. Impossible ou quasi impossible de se donner une après-midi de liberté. « Qu’est-ce que tu as fait de toute l’après-midi?». « Euh ! mon vini était déchargé ». « Mon œil ! ». « J’avais oublié mon vini dans ma voiture ». « Mon œil ! ». Et je ne parle pas de la géolocalisation possible.
Entre le progrès et la liberté, il faut parfois choisir, comme entre conduire et téléphoner.
Alors le télétravail, moi j’en rêve : plus d’embouteillage le matin, plus d’embouteillage le soir, plus la tronche de mon chef de service (j’ai failli écrire mon chef de sévices… ce qui serait du reste inexact, le mien il ne sévit qu’avec les hommes), plus les regards salaces de certains collègues ou inquisiteurs (« Alors, ça s’est passé comment ton rencard ? »). Et le midi, déjeuner quand j’en ai envie (il est vrai que dans mon service on mange à toute heure, mais ce qui me dérange c’est que par l’odeur alléchée je suis encline à me précipiter sur les vendeurs démarcheurs de maa’a). Ce qui est vrai aussi, c’est que les collègues finiraient par me manquer parce qu’un mois sans les voir et sans connaître les derniers potins, ça me frustrerait un peu.
Mais ce qui m’a fait tordre de rire ce fut le débat récent au CESEC. CESEC ! Bien sûr vous ne savez pas ce que c’est, sauf si vous avez lu mon billet dans TPM n° 455 de mai-juin 2021 (titre : Régression, deuxième époque). Je vous résume. Il s’agit de l’ancien CES, puis CESC quand la mode était d’ajouter le mot culture à tout, puis CESEC quand la mode fut à l’environnement. Utilité de l’institution ? reportez-vous à l’article de TPM.
Je traduis CESEC = Conseil économique, social, environnemental et culturel… Archi pompeux !
Donc le CESEC a examiné les problèmes posés par le télétravail. Accord difficile pour concilier les syndicats et les branches du patronat. Ce fut la CPME (= Confédération des petites et moyennes entreprises) qui s’éloigna du consensus en s’interrogeant sur la responsabilité de l’employeur en cas d’accident du travail à la maison : « l’employeur ne devrait pas être responsable des accidents qui arrivent sur un lieu auquel il n’a pas accès ».
Un accident du travail à la maison ? Avais-je bien entendu ? À défaut, je me suis posée la question: quels accidents du travail peuvent-ils survenir lors du télétravail ? Mon imagination débordante envisagea quelques cas.
Le télétravailleur, à force de rêvasser, avale son stylo (mais est-ce que ça existe encore avec les ordinateurs ?).
La chaise du télétravailleur se brise tandis que l’alizé passe entre les barreaux et la chute lui occasionne des lésions fessières.
Un essaim passant, une guêpe le pique sur le bout du nez, lequel enfle tant et si bien que le travailleur ne peut plus poser ses lunettes sur le cap, que dis-je, la péninsule !
Un téléphone sonne dans une pièce voisine et le télétravailleur transformé en randonneur (pour le rang d’honneur il ne faut plus y compter quand on exerce dans la solitude) se prend les pieds dans le tapis et s’en va cogner sur la commode, ce qui l’incommode plusieurs jours. Si cela arrive à une télétravailleuse, elle risque de se casser un ongle, celui qu’elle avait soigneusement limé le matin même avant de passer un élégant vernis.
Le chat familial griffe la télétravailleuse qui tardait à lui donner ses croquettes sur la moquette.
Le délégué syndical des personnes œuvrant à domicile attrape des migraines en voulant préparer un discours pour le 1er mai. C’est dur de prononcer « télétravailleuses, télétravailleurs, votre Mac vous exploite… et il vous empêche de vous unir avec tous les esclaves du clavier… Je vous AZERTY des risques du télétravail ! ne vous laissez pas faire ! Opprimés et déprimés de tous les PC unis chez vous ! ».
Bref, le télétravail, ce n’est pas gagné et pourtant, c’est une des solutions à la circulation routière et à la réduction des gaz des chappements, vous savez, ces gaz qui chappent le tuyau du même nom…
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